Chers amis,
Comme vous le savez, j’aime commenter les paroles difficiles que l’on trouve dans l’Évangile. C’est vraisemblablement le fait d’un converti. J’aime les paroles qui nous interpellent, comme on dit aujourd’hui, les paroles qui piquent un peu et qui donnent du sel à l’Évangile. Car la routine nous guette à chaque instant. A force d’entendre les Évangiles, on finit par s’y habituer, et s’habituer à la Parole de Dieu c’est embêtant. Il faut parfois se réveiller, et sortir de cette routine qui peut nous emporter.
Je commenterai donc la deuxième lecture : lecture de la première lettre de saint Pierre apôtre. Si vous avez pris le temps de lire cette lecture avant de venir – c’est très important de faire cet exercice. Comme avant d’aller visiter un musée, on se renseigne, on découvre les tableaux, on fait des recherches et ainsi au musée, on est à l’aise -. De la même manière, il est important de lire avant de venir à la messe, la Parole du Seigneur, de la lire lentement afin de bien s’en pénétrer. Vous avez donc peut-être été choqués par la deuxième lecture. Vous savez que nous sommes dans un catholicisme, disons-le, assez confortable et nous avons du mal avec certaines paroles, bien sûr, car les époques, les temps ne sont pas toujours les mêmes.
Souvenons-nous bien que dans l’histoire de l’Église catholique, jusqu’au traité de 316 – traité qui a fait de la religion catholique, la religion d’État – jusqu’à ce traité-là, les catholiques étaient persécutés. Les chrétiens, selon les empereurs plus ou moins cruels, devaient généralement adorer les dieux romains, jusqu’à Constantin. S’ils refusaient, ils subissaient les pires tortures. Vous imaginez bien que pour ces martyrs qui lisaient ces paroles, cela était un réconfort très profond. Ils étaient dans des épreuves très dures, pensons à saint Ignace d’Antioche, pensons à sainte Blandine, à tous les saints qui ont eu à subir ces épreuves imposées par des empereurs romains, en particulier. Quand ils entendaient : “dans la mesure où vous communiez aux souffrances du Christ, réjouissez-vous”, cela avait une toute autre valeur dans les affres terribles qu’ils vivaient et que le Seigneur nous épargne.
Quand on est un chrétien d’Orient, c’est la même chose, on ne sait pas de quoi demain sera fait et là aussi lire des épîtres comme celle-ci, cela apporte du réconfort. Si nous souffrons, si nous communions aux souffrances du Christ, nous pouvons nous réjouir. “Si l’on vous insulte au nom du Christ”, voilà encore quelque chose que nous avons peut-être un peu de mal à envisager, mais là aussi dans les pays d’Orient, les chrétiens sont facilement insultés. Cette parole prend donc, une toute autre mesure que pour nous.
Alors comment peut-on s’approprier à notre manière, ces paroles ?
Nous ne sommes pas des héros, comme les premiers martyrs. La vie des premiers martyrs était tellement édifiante qu’à la fin du règne de Constantin, ça a été le début du monachisme. La vie catholique s’était “ramollie” et certains ont décidé de partir dans les déserts, tels les stylites montant sur des colonnes durant toute leur vie, tels des saint Antoine du désert s’enfermant dans des sépulcres, mangeant quelques dattes par jour, c’était cela la réalité de l’époque.
Aujourd’hui c’est plus difficile à comprendre. Et pourtant.
Quand la Sainte Ecriture nous dit qu’il nous faut communier aux souffrances du Christ qu’est-ce que cela veut dire ?
Saint Pierre veut dire que lorsque les épreuves viennent vers nous, épreuves médicales, revers de fortune, drames dans nos familles, il y a deux manières de vivre les épreuves. La première manière c’est le refus, à ce moment-là, c’est la colère, on n’accepte pas, on ne veut pas. “Qui suis-je pour mériter cela ?”, comme si nous étions des saints ! C’est une première possibilité, c’est la révolte. { La deuxième possibilité, c’est l’acceptation surnaturelle des épreuves en union avec la Croix de Notre Seigneur.}
Après la révolte, il peut y avoir justement par la grâce de Dieu, un assouplissement du cœur qui nous conduit à la communion avec Jésus. On se souvient que Jésus a souffert sa Passion, pour nous sauver et alors on prend les choses autrement. “Seigneur, à travers ces épreuves – la phrase est difficile -, je sais, parce que c’est ma foi qui me le dit, que c’est toi qui viens me visiter.”
Un saint, je crois que c’était saint Antoine du désert, disait toujours que quand Notre Seigneur apparaît dans une apparition, il apparaît toujours avec sa Croix. Si Jésus nous visite, il vient avec sa Croix. C’est là, une grande réalité de notre religion. Donc cela veut dire, que si les épreuves sont là, petites ou grandes, il faut prier la Sainte Vierge, et le Seigneur, s’aider de bonnes lectures. Il faut s’unir au Seigneur et lui dire : “Seigneur, tu as tellement souffert pour nous, je t’offre ici un petit bout de ma souffrance”.
A ce moment-là, nous ne sommes plus des personnes en colère, nous ne sommes plus les gens révoltés par les épreuves qui nous arrivent, au contraire. Je les vois beaucoup dans les hôpitaux et dans les maisons de retraite, des personnes qui acceptent l’épreuve de bon cœur et qui à ce moment-là, entrent dans un chemin de lumière.
Ce n’est pas facile à vivre, bien sûr, mais c’est la Parole ici, qui nous est donnée par l’Évangile.
Alors vous me direz, nous avons bien du mal à accepter tout cela, comment faire ?
Il y a une petite sainte très à la mode aujourd’hui, pour des raisons tout à fait valables. C’est vraiment la sainte pour notre époque : sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus. Elle est sainte patronne de notre pays, nous la connaissons bien et nous l’aimons bien. Très souvent, quand on lit Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus – je vous conseille tout particulièrement un livre qui s’appelle Conseils et souvenirs – dans lequel elle a écrit des lettres, lorsqu’elle était maîtresse des novices. Les novices ont une particularité, elles posent beaucoup de questions et vous trouverez les réponses de sainte Thérèse. J’y ai trouvé des réponses admirables, en quantité formidable. Vous savez que sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus exaltée, avait voulu faire de grandes mortifications et avait commencé à porter des instruments de pénitence. Elle avait fini à l’infirmerie avec de grandes douleurs. Ce génie – mais c’est pour peut-être pour cela qu’elle est docteur de l’Église – ce génie de sainte Thérèse a trouvé la solution. “Moi je suis toute petite, disait-elle, je ne suis pas capable de supporter tout ce qu’ont supporté les grands martyrs, les saint Ignace,sainte Blandine, sainte Agnès… J’ai trouvé ce qui sera ma voie : le martyre à coups d’épingle”, la formule est belle et c’est tout à fait magnifique et très adapté à notre temps.
Une petite contrariété, je l’offre.
Quelqu’un qui m’a mal parlé, je peux l’offrir.
Une incivilité, du temps perdu à faire la queue, je l’offre.
Et voilà, en fin de journée, on se retrouve à avoir offert énormément de choses et c’est cela le martyre à coups d’épingle ! C’est le génie de sainte Thérèse qui nous montre comment dans notre vie quotidienne, nous pouvons, nous aussi, nous unir aux souffrances du Seigneur, mais en “personne toute petite”. Ce génie thérésien nous conduit à l’humilité, quelle merveille !
Mes chers amis, offrons ce que nous pouvons, encore une fois des petits coups d’épingle journaliers qui ne manquent pas d’arriver et qui seront les outils pour nous conduire à une plus grande communion avec Notre Seigneur, chaque jour. N’est- ce pas merveilleux tout cela. Remercions sainte Thérèse de l’Enfant Jésus et essayons de l’imiter.
Amen.
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