Homélie de la Solennité du Saint-Sacrement, dimanche 11 juin 2023, Père Ollier.
- Le pain fruit de la terre et du travail des hommes
Dans une simple hostie, faite de farine et d’eau, se cache toute l’histoire de la terre. Les grains de blé qui ont servi au meunier à produire de la farine sont le fruit de la terre et des eaux qui ont 4,5 milliards d’années. Cela nous ramène bien loin dans le passé ; mais la terre et l’eau ne suffisent pas. Il faut aussi la lumière du soleil pour que s’effectue la photosynthèse, pour que la plante pousse et donne son fruit. Il faut aussi la chaleur du soleil, pour que le grain parvienne à maturité. Nous remontons ainsi dans le temps à 4, 6 milliards d’années, soit une soixantaine de millions d’années avant l’apparition de la terre.
Dans cette simple hostie, se tient l’histoire de la terre à laquelle s’ajoute le travail, la peine, le talent des hommes. Et l’on peut en dire autant du vin, en ajoutant cependant l’inventivité et le goût des hommes.
Tout aliment digne de ce nom, porte en lui le secret du temps, le secret de la terre , du soleil et du travail des hommes.
C’est pourquoi l’Église et le peuple de l’Alliance ont depuis toujours commencé leur repas en bénissant le créateur et le travail des hommes.
Avec mes confrères prêtres, lorsque nous débutons le repas, nous n’omettons jamais de bénir Dieu, pour les fruits de la terre et du travail des hommes. Nous ne le faisons pas simplement à la messe. Nous le faisons à chaque repas. C’est une bonne habitude. Nous le faisons en communauté, au presbytère et nous le faisons en public lorsque cela se présente. À la fin du repas, nous rendons grâce à Dieu, pour ce moment passé ensemble, pour ce moment où nous avons refait nos forces et raffermi notre fraternité.
- Le pain de Dieu, source de vie éternelle
Cette hostie que je tiens à la main, deviendra bientôt par la puissance du souffle de Dieu, le sacrement de la présence du Christ à nos côtés. Il deviendra source de vie, source de vie éternelle. Il nous projettera en quelque sorte jusqu’au terme de l’histoire.
Ainsi vous le comprenez, chers frères et sœurs, l’Eucharistie nous transporte à chaque fois que nous communions, depuis les premiers instants de l’univers jusqu’au terme de l’histoire où Dieu sera tout en tous. L’Eucharistie nous transporte jusqu’à l’éternité de Dieu et nous transforme. L’Eucharistie concentre en elle tous les temps, tous les états de vie, mais elle contient aussi toute l’histoire de l’humanité depuis son commencement jusqu’à sa fin. Du plus sommaire au plus achevé.
C’est là l’œuvre du Seigneur. Une merveille à nos yeux.
C’est pourquoi, frères et sœurs, nous ne devons jamais manquer lorsque nous participons de corps et de cœur à la célébration de l’Eucharistie, de nous insérer dans ce processus de transformation qui va de la terre jusqu’aux cieux. C’est là l’essentiel de notre vie chrétienne. Si nous la manquons, alors nous ne devons pas nous étonner de nos pauvres progrès spirituels. Nous progressons spirituellement à la mesure de notre insertion dans le corps du Christ, dans la plénitude du Christ. Non seulement, nous devons nous insérer dans ce processus de transformation, mais nous devons insérer aussi le monde, offrir le monde, nos familles, notre histoire, notre travail, ce qui fait le quotidien de notre vie. Ainsi vous le voyez, cette hostie lorsqu’elle sera consacrée portera tout à la fois le témoignage de notre humanité, de notre travail, de notre peine, de nos souffrances, de ce que nous sommes, et invisiblement notre transfiguration dans le corps du Christ, dans la présence éternelle du Dieu vivant à nos côtés. Je le fais pour vous à chaque eucharistie, je vous offre à Dieu avec tout ce que vous portez, votre histoire, vos familles, vos talents. Tout ce qui est vôtre passe de ce monde au Père, dans le mystère de la Pâque du Christ.
Chers frères et sœurs, n’hésitez pas à vous offrir au cours de la messe, à offrir vos familles, vos enfants, vos petits-enfants, votre travail, vos difficultés, vos échecs aussi. Cette semaine, j’ai offert deux fois la messe pour une toute petite fille, Toscane, née la semaine dernière et frappée par une méningite. Son arrière-grand-mère et son grand-oncle sont là dans notre assemblée. Je me réjouis ce dimanche de la savoir en vie et presque tirée d’affaires. C’est la puissance de la grâce de Dieu, c’est la puissance du sacrifice du Christ offert en chaque Eucharistie. N’hésitez pas à offrir des messes, pour des intentions graves, des intentions qui vous concernent et des intentions aussi qui concernent notre société, notre monde. L’œuvre de Dieu passe par la transformation de l’univers, de nos cœurs, de nos pauvres cœurs par la puissance de Sa grâce. Cette puissance se déploie invariablement dans l’Eucharistie.
Frères et sœurs, que le Seigneur nous rassemble tous ensemble, car c’est là le vœu majeur de Dieu, de faire de nous qui sommes divers une unité, de faire de nos sentiments, de nos choix, qui sont aussi divers, une unité .
Je vous cite pour terminer une très ancienne prière eucharistique. C’est la plus ancienne que nous connaissons, elle date de la fin du tout premier siècle, elle est tirée d’un texte que l’on appelle la Didachè, c’est-à-dire l’Enseignement des Apôtres. Voici cette prière eucharistique qui servait aux premiers chrétiens pour la bénédiction du pain qui allait être consacré.
Comme ce pain rompu, autrefois disséminé sur les montagnes, a été recueilli pour n’en faire plus qu’un, rassemble Seigneur ton Église, des extrémités de la terre, dans ton Royaume. À toi la puissance et la gloire pour les siècles des siècles. Amen
Père Ollier.
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