Homélie du dimanche 7 Septembre 2025

Frères et sœurs,

Avouons-le, frères et sœurs, il y a des passages de l’Évangile que l’on a plus de plaisir à entendre que d’autres. Celui d’aujourd’hui n’est pas celui que l’on accueille avec le plus de joie.

Celui qui ne renonce pas  à lui-même, ne peut pas être mon disciple.

Le Christ n’exagère-t-il pas un petit peu ? Voilà des paroles rudes, abruptes, exigeantes. Si bien que certains peuvent dire : “moi je ne peux pas être de ce disciple”.

Et pourtant ? L’Évangile est toujours un chemin de joie, un chemin d’approfondissement de notre relation avec Dieu. L’Évangile nous est donné pour notre croissance spirituelle, notre croissance humaine avec le Christ.

Alors je voudrais retenir trois mots de cet Évangile. Vous allez vous habituer souvent, je retiens trois points à partir de l’Évangile. Aujourd’hui ce seront trois mots qui peuvent éclairer notre route et nous donner à réfléchir.

Premier mot, c’est dans l’introduction, “faisaient route.”

 Des personnes faisaient route avec Jésus, ça n’a l’air de rien, mais c’est intéressant de remarquer que beaucoup de scènes de l’Évangile se déroulent lorsque Jésus faisait route avec les gens. Jésus est en chemin. Et cela, au début de l’Évangile, nous rappelle opportunément, au début de l’année, que Jésus marche avec nous, que le disciple, c’est celui qui suit. C’est celui qui accomplit un chemin avec le maître.

Et lorsque l’on marche, on découvre autre chose. Lorsque l’on marche, notre cœur, nos yeux, notre esprit, notre âme s’ouvrent à d’autres réalités, à des réalités nouvelles, à des changements aussi. Puisque nous commençons, ensemble, une nouvelle période, une nouvelle année, nous allons marcher ensemble. Je rejoins votre marche, vous avez déjà commencé bien sûr à marcher à la suite du Christ. Mais nous allons marcher ensemble. Puissions-nous ne jamais être assis confortablement sans que rien ne bouge dans notre vie. Le chrétien ce n’est pas quelqu’un qui est dans un fauteuil – et comme on dit un peu ordinairement- avec les doigts de pied en éventail.

Que nous soyons jeunes ou plus âgés, c’est toujours une marche intérieure avec le Seigneur. Elle va justement continuer. Un accueil  quotidien de ce qu’il a à nous dire.

Deuxième mot : “préférer” 

Vous avez entendu dans ce passage de l’Évangile, ces mots si forts de Jésus “si quelqu’un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et sœurs, et même à sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple. Il n’est pas digne de moi.” Voilà qui dépasse complètement nos perspectives humaines, surtout si nous sommes habitués, si nous avons été éduqués à un christianisme qu’on pourrait appeler du juste milieu, sans excès. Sans excès de piété, sans excès d’engagement, sans excès de signes intérieurs. Nous savons bien que nous ne sommes pas de bons chrétiens. Nous acceptons de nous reconnaître pécheurs. Mais on s’accommode de cela, d’un christianisme un peu mou, du juste milieu, sans excès, sans moments où l’on accepte de se laisser bousculer. Et pourtant ces paroles de Jésus dans l’Évangile,  ce sont des paroles qui appellent ses disciples à  un christianisme de combat, un christianisme de décision, un christianisme où jour après jour on va apprendre ce que signifie préférer Dieu, préférer le Christ. On comprend que peut-être certains, en entendant des paroles comme cela, disent : “moi, je ne suis pas de ses disciples. Moi, je ne veux pas couper les relations avec mes proches, avec ceux que j’aime.”

Alors comment comprendre ce mot “préférer” ?

Comment comprendre cette parole de Jésus ?

Il ne s’agit pas bien-sûr de brûler toutes nos relations, de couper avec tout ce que nous avons d’important. Mais il s’agit de comprendre qu’il y a une présence du Christ qui vient, d’une manière supérieure, éclairer tout ce que nous vivons.

Éclairer nos relations, nos liens familiaux, professionnels, amicaux, mais aussi qui vient transcender tout ce que nous avons, tous nos biens. Jésus ne vient pas être le rival de nos relations, de nos amours humaines qui sont très justes et qui sont bonnes.

Jésus ne demande pas aux époux de se séparer. Jésus de ne demande pas aux parents de couper avec leurs enfants, bien sûr que non. Mais Jésus vient nous aider à comprendre sa présence, au cœur de nos relations humaines. Au cœur de nos affections humaines qui sont bonnes, il y a un éclairage, il y a une présence, sa présence qui vient donner sens et qui vient nous aider semaine après semaine à ajuster.

Préférer, ce n’est pas aimer moins.

Préférer, c’est aimer mieux. Aimer plus justement.

Et vous savez dans nos relations humaines, nous avons sans cesse à ajuster nos liens.

Exemple : entre les époux.

Il y a une relation qui est sans cesse à améliorer et à ajuster. L’autre n’est pas un absolu. Dieu seul est absolu.  Et les époux chrétiens sont invités à mettre le Christ qui vient éclairer leur relation au milieu d’eux. Je dis souvent aux jeunes fiancés que le mariage chrétien est un mariage à trois. On tient la main de celui ou de celle qu’on aime et l’autre main tient celle du Christ qui vient éclairer et apprendre à ajuster la relation.

Mais aussi entre parents et enfants, il y a des liens qui sont à ajuster.

J’ai dans ma vie de prêtre, beaucoup accompagné des fiancés dans la préparation au mariage, je le fais encore et je suis frappé comme nombre d’entre eux ont du mal à accueillir la parole biblique reprise par le Christ. “ L’homme quittera son père et sa mère et s’attachera à sa femme.” Il y a des cordons parfois qui ne sont pas ajustés et qui ne sont pas coupés. Le Christ vient nous aider à avoir des relations justes, plus profondes, plus vraies et plus aimantes. Oui préférer c’est cela. C’est laisser le Christ éclairer ce que nous vivons.

La famille chrétienne c’est la famille qui met le Christ au centre. Et qui, à partir de son enseignement, de sa présence, ajuste tout ce qu’elle vit. Pas d’une manière automatique du jour au lendemain, mais tout au long des étapes de l’existence.

Troisième mot : “renoncer”

  Voilà encore un mot un peu rude. Choisir c’est renoncer. Aimer c’est renoncer. Contrairement à notre première impression, renoncer est positif. Il ne s’agit pas de renoncer pour se faire souffrir mais de renoncer toujours pour avancer… cela en n’ oubliant pas la direction, le but. Ce qui compte, c’est le but. C’est dans l’Évangile, celui qui construit une tour, celui qui organise une armée et la guerre.

Il sait quel est le but, quel est l’objectif. Et renoncer, cela va être ne jamais oublier l’essentiel par rapport à ce but, par rapport à la victoire.

Croyez-vous que c’est difficile pour un prêtre de renoncer au mariage, d’opter pour le célibat ? Bien-sûr, c’est un renoncement, mais ce n’est pas si difficile, si justement on comprend que renoncer c’est sans cesse opter pour l’essentiel, c’est opter pour le but qui est davantage de liberté pour être à la disposition d’une communauté où l’on est envoyé.

Croyez-vous et savez-vous, pensez-vous, vous qui êtes marié, par exemple, que la fidélité dans le mariage, c’est terrible ? Non, si l’on comprend et qu’on n’oublie jamais le but, si on sait que cette fidélité est faite pour plus d’amour,  pour un approfondissement de l’amour. C’est opter, choisir pour l’essentiel.

Ainsi, aimer passe forcément par des renoncements. Et c’est ce que le Christ nous invite à faire en ce début d’année.

Alors mes amis, oui, demandons au Seigneur de nous aider, en étant en route avec lui, à comprendre mieux ce que veut dire “le préférer.” En le mettant au centre. Et peut-être, renoncer à certains comportements, à certains attachements à purifier dans notre existence.

Les deux jeunes saints que le pape Léon XIV est en train de canoniser, en ce moment à Rome. Giorgio Frassati et Carlo Acutis – mort à 25 ans et mort à 15 ans – nous sont donnés justement pour nous rappeler comme ils l’ont  accueilli eux-mêmes dans leur existence bien courte mais si forte, l’exigence de préférence,  la radicalité, la force de l’Évangile. Pour eux c’était vraiment un évangile de combat.

Que ces jeunes saints avec des paroles simples mais fortes qu’ils nous ont laissées

– je pense à Giorgio Frassati qui disait :

Il ne s’agit pas de vivoter, c’est-à-dire d’être à la superficialité de notre vie mais de vivre.

Préférer, c’est vivre. Renoncer, c’est vivre. Et sa devise qui était “ verso l’alto” ( vers les sommets) nous appelle à aller vers le haut.

– et puis Carlo Acutis, qui disait tout simplement

Trouve Dieu, tu trouveras la vie.

Voilà ces deux figures qui nous invitent à entrer dans l’exigence de l’Évangile.

Oui, Seigneur, nous te bénissons de nous donner cette parole aujourd’hui pour démarrer ensemble cette année. Qu’elle éclaire notre route, nous conforte de ta présence à nos côtés, pour grandir en humanité et pour grandir dans la foi en toi.

Amen.

 

  

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