Homélie de la Toussaint 2023

Une foule immense, c’est ce que voit le voyant de l’Apocalypse. Une foule immense, innombrable. Elle se tient devant le trône de Dieu.

C’est là qu’ils apparaissent, saints aux yeux de Dieu.

Aux yeux des hommes, ils ne paraissent pas, ayant choisi de s’orner non des trésors de la terre, mais des trésors des cieux – c’est-à-dire des vertus :  la douceur, la pureté, la clémence.

 

Comment sont-ils parvenus jusqu’à ces rivages bienheureux où paraissent les saints dans la lumière de Dieu ? Comment sont-ils parvenus jusqu’à cet autel de Dieu pour paraître bienheureux à ses yeux ?

Trois voies se sont offertes à eux. Parcourons avec eux ces chemins de sainteté.

 

  1. La première voie :  ils ont banni la crainte, la peur.

 

On n’est pas saint en tremblant. Il faut une certaine vigueur, il faut vouloir atteindre cet état de sainteté, où Dieu paraît toujours premier, où Il est toujours servi le premier.

Ne rien craindre donc, sinon que nous ne soyons pas fidèles à la promesse de Dieu.

Le reste, les puissances du monde, le qu’en-dira-t-on, ce que dit le monde, ses puissants ou ses sages importe peu.

 

“ Celui qui veut sauver sa vie, dit le Seigneur, la perdra. Celui qui la perdra à cause de moi, la sauvera.”

Et ailleurs : “Ne craignez pas ceux qui ont le pouvoir de tuer les corps, mais non pas l’âme.”

Enfin, au soir de la résurrection, les paroles de Jésus à ses apôtres réunis dans la salle haute : “N’ayez pas peur.”

La peur encombre le regard, elle ne permet pas de voir distinctement, elle tétanise et rend indisponible à d’indispensables changements.

Le grand théologien anglican au XIXème siècle, John-Henry Newman, devenu catholique, disait que “vivre c’est changer.” Et il ajoutait : “et vivre bien, c’est changer souvent.”

Les saints ont été ceux qui, au souffle de l’esprit, sous l’inspiration de l’Esprit, ont su se convertir, introduire des changements dans leur propre vie, mais aussi des changements de mentalité dans le monde.

Combien de saints ont affronté l’actualité brûlante dans laquelle ils se trouvaient.

Pensez à saint François d’Assise qui a choisi la pauvreté au début du XIIIème siècle, alors que la bourgeoisie commence à s’installer dans le nord de l’Italie avec son cortège d’excès en tout genre.

Pensez à saint Jean de Dieu qui a choisi de venir en aide à ceux auxquels on ne s’intéressait plus. Son amour envers les malades le conduit à fonder un hôpital en 1537, le premier hôpital moderne.

Tel est le regard des saints, pur, limpide.

Être gouverné par la peur est la meilleure façon de manquer le rendez-vous de l’inattendu de Dieu. Ouvrez vos cœurs à la rencontre de Celui qui est différent de vous. Invitez-Le. N’ayez pas peur.

  1. La deuxième voie qu’empruntent les saints, c’est l’audace.

 

Ne pas craindre, avoir l’audace d’être enfant de Dieu.

Avez-vous remarqué que dans l’introduction à la prière du Notre Père, au cours de la messe, le prêtre dit “comme nous l’avons appris du Sauveur et selon son commandement, nous osons dire”, nous avons l’audace de dire Notre Père. Et il est vrai qu’il faut avoir beaucoup d’audace pour se reconnaître enfant de Dieu et vivre en enfants de la Lumière.

Osez être des enfants de Dieu. Je crois que dans le cours ordinaire de notre vie, il y a bien des moments où nous pouvons témoigner de notre espérance et de notre foi, être véritablement des enfants de Dieu, des enfants de lumière, des porteurs d’espérance. Il n’est pas rare que dans une journée nous ayons l’occasion de manifester notre attachement filial à Dieu. Par notre témoignage, notre parole lorsqu’on nous fait état de malheurs ou de troubles.

À l’annonce d’un décès, nous pouvons avoir une parole d’accompagnement en disant par exemple que “nous ne sommes pas sans espérance”, que la mort n’est pas le dernier mot de l’homme.

Dans la maladie, on peut dire à ceux qui nous en font état que “nous prierons pour eux, pour les malades.”

Dans les difficultés conjugales, une parole peut accompagner aussi le moment difficile que traverse un couple. Leur conseiller de prendre un tiers crédible et sage, un professionnel parfois, pour parler en paix et envisager l’avenir plus sereinement.

Avoir l’audace de réintroduire le vocabulaire chrétien dans le lexique si appauvri de la langue, les mots de vertu, de sacrifice, de renoncement, de croix, etc…

Avoir l’audace de dire non à la culture de mort, à la société de l’euthanasie.

Un mot à destination des parents et des grands-parents.

Il me semble qu’il y a aujourd’hui un chantier très important qui est de permettre aux enfants, et en particulier aux adolescents de trouver en eux-mêmes, les ressources d’une parole qui exprime le fond de leur cœur, de leurs joies, de leurs émotions, de leurs douleurs. Cela n’est pas inné, peut-être encore plus pour les garçons. Et je ne suis pas sûr que les publications postées sur les réseaux sociaux aident les adolescents. Il faut qu’une parole juste puisse naître, une parole accompagnée par les parents, les grands parents, la famille. Peut-être, en faisant parfois le détour par l’écriture. Après de grands évènements, (deuil, mariage, changement important) je conseille toujours aux personnes que j’accompagne d’écrire, une page, deux pages, de coucher sur le papier parfois lentement ce qu’elles portent en elles profondément.

Inventer des chemins de résolution, des chemins d’espérance, telle est la tâche urgente des chrétiens.

3.La troisième voie : le secret de la sainteté.

Je vous cite un saint. Pour comprendre ce qu’est la sainteté, autant entendre un saint. Il s’appelle saint Claude La Colombière.

“Mon Dieu, je veux être saint entre vous et moi.”

La sainteté, c’est le secret de Dieu et de nous-mêmes. Le choix que nous faisons de répondre à l’appel de Dieu. L’appel de Dieu ne vient pas forcément solliciter ce que nous avons de plus remarquable, mais quelquefois ce qu’il y a de plus pauvre et de plus banal en nous. Dieu nous demande de lui en faire l’offrande.

Frères et sœurs, que chacun et chacune d’entre vous réfléchisse à ce que Dieu l’appelle à offrir aujourd’hui de lui-même, d’elle-même. Nous porterons cette offrande jusqu’à l’autel de Dieu. Gageons que Dieu rende, à chacun, à chacune, au centuple, comme Il l’a toujours fait dans la vie des saints.

Amen.

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